Fonction publique : danger maximum

Avec en premier lieu, la mise au rencart du statut de Fonction publique. C’est Eric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique qui l’a avoué : “Le statut n’est pas gravé dans le marbre” “ (1).

C’est pour permettre sa destruction que le gouvernement vient de mettre la dernière main à son projet de de loi ” relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique “, dont la sortie ne doit rien au hasard.

Ces nouvelles attaques, d’une envergure sans précédent, sont complémentaires à l’annonce des réorganisations ou fermetures de services, qui vont rapidement se profiler à l’horizon dans le cadre de la Révision générale de politiques publiques (RGPP) et sur lesquelles planchent actuellement les Préfets et Sous-Préfets et autres responsables de services déconcentrés et centraux.

Fonction publique : danger maximum

Nombreux sont les agents qui pourraient potentiellement se retrouver assez rapidement en position de mobilité… forcée avec un vrai risque d’éloignement accentué de leur domicile. Que personne ne croit que ce soit impossible. C’est ce qui s’est passé pour un nombre conséquent d’agents de France Télécom !

Pour atteindre cet objectif, l’article 7 prévoit tout d’abord, pour “le fonctionnaire dont l’emploi a été supprimé ou modifié de façon substantielle” de l’accompagner pour retrouver “un emploi correspondant à son grade dans son service ou dans une autre administration, d’accéder à un corps ou cadre d’emplois de niveau au moins équivalent, d’accéder à un emploi dans le secteur privé, de lui permettre de reprendre ou créer un entreprise“.

Et attention, les agents confrontés à cette situation devraient signer une convention qui ” précise les obligations du fonctionnaire en réorientation professionnelle ainsi que les actions et moyens mis en place par l’administration dans le cadre du projet “. Chaque fonctionnaire concerné devrait donc négocier individuellement son contenu avec l’administration dans un rapport, rappelons-le, de subordination. Un combat inégal !

Durant cette période, l’agent pourrait effectuer des missions temporaires pour toute administration et/ou suivre des actions de formation, d’évaluation ou de validation des acquis de l’expérience professionnelle. Sauf que l’intéressé n’aura d’autre choix que de s’orienter vers des actions établies au regard des… objectifs contenus dans la convention. Cela reviendrait à se lier les mains pour la suite des évènements.

Objectif : faire déguerpir un maximum d’agents dans le privé ou les obliger à accepter une mobilité dont ils ne voudraient pas, y compris, si nécessaire, dans les deux autres fonctions publiques, territoriale ou hospitalière. Pour les récalcitrants, une arme redoutable est introduite : “la mise en disponibilité d’office, ou le cas échéant à la retraite […] lorsque le fonctionnaire n’a pas respecté les engagements qu’il avait conclus dans le cadre de la convention ou qu’il a refusé successivement trois emplois correspondant à son grade et à son projet personnalisé d’évolution personnalisée”. Rappelons que la mise en disponibilité d’office a pour conséquence pour le fonctionnaire de cesser de percevoir son salaire (sans avoir droit aux indemnités chômage) mais aussi de bénéficier de ses droits à l’avancement et à la retraite. Elle peut aussi aboutir à un licenciement.

“Cerise sur la gâteau”, l’article 9 du projet de loi prévoit également de recourir à l’intérim, au nom de la lutte contre la… précarité, notamment “pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d’un congé maladie, d’un congé maternité ou d’un congé parental […] ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d’un an à la vacance d’un emploi qui ne peut – être immédiatement pourvu”.

Inutile de dire qu’il serait très facile de multiplier ces contrats d’un maximum d’un an, les freins à leur renouvellement étant limités. Et au cas où l’administration continuerait ” d’employer le salarié d’un entreprise de travail temporaire après la fin de sa mission sans avoir conclu avec lui un nouveau contrat de travail ou sans nouveau contrat de mise à disposition, ce salarié est réputé lié à l’utilisateur par un contrat à durée déterminée de trois ans “.

Autrement dit, il s’agit de généraliser l’occupation de postes permanents normalement occupés par des fonctionnaires par des agents intérimaires ou contractuels “ (2). La porte grande ouverte au délestage de nombreuses missions. Sans oublier la généralisation pour nombre de fonctionnaires du temps incomplet auprès de plusieurs employeurs qui se trouveraient la plupart du temps sur des sites différents !

UN OBJECTIF LIMPIDE

Détruire un statut bénéficiant à tous les fonctionnaires – pour augmenter une précarité d’emploi destinée à rendre plus malléables et corvéables à merci les agents -, progressivement élaboré notamment pour protéger les agents publics des pressions politiques et extérieures mais aussi en contrepartie de ces garanties, pour leur imposer des obligations dont celle de servir l’intérêt général et non l’intérêt particulier ; procéder à un plan de suppressions de postes sans précédent ; et enfin tenter d’affaiblir toujours davantage les organisations syndicales encore bien implantées dans le secteur et considérées comme un frein potentiel à cette liquidation. C’est à une véritable privatisation d’une partie des prérogatives des administrations qui est à l’oeuvre. C’est inacceptable et dangereux y compris pour les usagers qui sentiraient très rapidement la qualité du service de nouveau se dégrader.

Le président de la République et nombre de ses ministres mentent effrontément quand ils prétendent que ces contre-réformes viseraient à améliorer la situation. Eric Woerth a même explicitement reconnu que c’était tout le contraire qui se produirait en déclarant : ” L’exemple canadien est certainement le plus emblématique. Il a cependant des imperfections, notamment parce que le niveau du service public s’y est quelque peu dégradé ” “ (1). L’ironie veut qu’un rapport sur la…mobilité est prévue pour être aussi publié à l’automne 2008 au …Canada.

POUR EMPECHER CE MASSACRE, LA SOLUTION
UNE MOBILISATION UNITAIRE

En France, le projet de loi doit d’abord être présenté au conseil des ministres le 9 avril avant d’être discuté au Parlement en juin normalement. Sud Intérieur et l’Union syndicale Solidaires continueront à informer les personnels sur l’évolution de ce projet. Nous avons déjà pris ou nous prendrons prochainement, les initiatives nécessaires pour construire, avec les autres organisations syndicales et les agents, les mobilisations unitaires indispensables pour obtenir l’arrêt de ce véritable jeu de massacre.

NON REMPLACEMENT D’UN FONCTIONNAIRE SUR DEUX

C’est ce qu’a annoncé Eric Woerth le 19 mars dernier pour la loi de finances 2009. Tout fier, il a même précisé qu’il prévoyait de porter le ratio dans sa propre administration de Bercy à 58 % de fonctionnaires partant en retraite non remplacés “ (3)).

+ 380 %  “ (4)

C’est l’augmentation du dividende versé aux actionnaires du groupe d’ingénierie Assystem. Les salariés n’ont pas bénéficié des mêmes largesses…

+ 296 %

C’est l’augmentation de l’indemnité de fonctions de Philippe Bas, ancien ministre du gouvernement De Villepin et secrétaire général de l’Elysée sous Chirac, tout nouveau président de l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrants (Anaem). Elle passe de 10 000 à 39 600 € annuels “ (5)). La présence minimum exigée aux réunions pour pouvoir en bénéficier est de…2 par an. Vraiment harassant…

5 000 € MINIMUM A VIE

C’est la somme que touchera Arnaud Teulé, candidat “malheureux” aux municipales de Neuilly et ancien conseiller de Nicolas Sarkozy chargé des “affaires réservées”, qui sera nommé prochainement au tour extérieur, Inspecteur d’Académie par la grâce d’une…création de poste ! “ (6).

LE PRIVE , MEILLEUR GESTIONNAIRE QUE LE PUBLIC ? FOUTAISE !

Pour sauver de la faillite la banque privée Northern Rock, le gouvernement britannique l’a nationalisée temporairement en réinjectant déjà 73 milliards d’euros ! Le même gouvernement prévoit pourtant un retour au secteur privé lorsque “les marchés financiers se stabiliseront” “ (7). Vu leur état, ce n’est pas vraiment raisonnable… Autre conséquence de ce désastre : 2 200 salariés vont perdre leur emploi.

NOUVEAUTE 2008 : L’ENTRETIEN PROFESSIONNEL

Rappelons tout d’abord que ce dispositif concernera les fonctionnaires, les agents non-titulaires et les Ouvriers d’Etat dépendant de notre ministère soit 39 000 agents. En 2008, vous allez donc être convoqués normalement en mai/juin à votre entretien annuel.

LES PRINCIPAUX CHANGEMENTS

  • la suppression de la notation y compris de la marge d’évolution
  • l’introduction d’une possible modulation salariale comme le précise l’article 13 du décret du 17 septembre 2007 :”Lorsque des régimes indemnitaires prévoient une modulation en fonction de la manière de servir, celle-ci est appréciée par le chef de service au vu du compte rendu de l’entretien professionnel”
  • la modification de la procédure de recours.

LE SUPERIEUR HIERARCHIQUE DIRECT AU COEUR DU DISPOSITIF

Avec la suppression de la notation, la valeur professionnelle de l’agent ne sera plus appréciée par le chef de service mais par son supérieur hiérarchique direct, chargé de la conduite de la procédure d’entretien professionnel. C’est un changement FONDAMENTAL qui place celui-ci au coeur du système d’individualisation des carrières. C’est à partir de ses appréciations contenues dans le compte-rendu que seront attribuées ou non par le chef de service, à une partie seulement de l’effectif, les réductions d’ancienneté.

L’attribution du rôle pivot au supérieur hiérarchique direct, avec le risque bien réel de voir certains (pas les plus nombreux) se transformer en véritables “petits chefs”, est un pas supplémentaire pour diviser encore plus les agents entre eux et les mettre en concurrence. En espérant ainsi les détourner des véritables enjeux collectifs que sont le combat contre les suppressions de postes et la démolition du statut qui accentuent la pression donc la souffrance au travail ; et l’amélioration de la qualité du service public rendu aux usagers et les revalorisations des carrières.

CE QUI N’EST PAS OBLIGATOIRE

  • 1 – la participation a l’entretien professionnel qui n’empêche pas l’évaluation ni l’appréciation de la valeur professionnelle des agents et leur manière de servir. Le meilleur exemple de cette affirmation : des agents qui avaient boycotté leurs entretiens l’année dernière ont été notés ! ;
  • 2 – la signature du compte – rendu. En cas de refus, le supérieur hiérarchique devra apposer une mention en ce sens en la datant, ce qui ouvrira les délais de recours.

CE QUI EST OBLIGATOIRE

  • 3 – la convocation au moins 8 jours à l’avance avec transmission des documents supports dont la fiche de poste ou de fonctions et les objectifs fixés au service ;
  • 4 – l’évaluation préalable du supérieur hiérarchique chargé de conduire la procédure ;
  • 5 – la transmission du compte-rendu aux intéressés, qu’ils aient participé ou NON à l’entretien. Sud Intérieur précise encore cette année que le refus de ne pas se rendre à l’entretien ne constitue pas une opposition à l’évaluateur en temps que tel, qui devra lui–même passer à la même « moulinette ». C’est le dispositif qui est combattu.
  • 6– un délai de 8 jours maximum après la remise du compte-rendu doit être laissé aux agents pour présenter leurs observations.

CE QUI EST POSSIBLE

  • 8- autoriser les agents qui décideraient de se rendre à l’entretien, d’être accompagnés, notamment par un représentant syndical. Le silence des textes sur le sujet signifie clairement que c’est envisageable. C’est d’ailleurs ce qu’avait indiqué un formateur de la Préfecture de Seine – Martime en 2004, lors d’une session de présentation de la mise en place de l’évaluation-notation. L’administration, si elle refuse cette hypothèse, commettrait donc une nouvelle erreur d’interprétation des textes qui ne serait pas la première…Nous reviendrons prochainement plus en détail sur ce nouveau dispositif.

REAGIR RAPIDEMENT ET COLLECTIVEMENT

Face à cette nouvelle procédure, il est d’ores et déjà indispensable que les agents, y compris ceux qui se verront confier la charge de l’évaluation, discutent entre eux de la manière de résister le plus efficacement possible à cette machine à casser les solidarités collectives. Sud Intérieur, qui a toujours refusé et dénoncé la logique de compétition individuelle entre collègues induite par ce dispositif d’évaluation, invite, dès maintenant, ceux qui le souhaitent, à nous contacter pour les appuyer dans leur réflexion et construire ensemble la riposte.

Cautionner ce système, c’est accepter que s’impose une inacceptable logique importée du privé, plaçant la concurrence entre agents au cour d’un système, dont la seule boussole est l’obsession de la rentabilité. Une direction incompatible avec la philosophie même du service public. C’est en se regroupant que nous arriverons à lui faire échec, pour offrir à TOUS les agents des garanties COLLECTIVES.

Sud Intérieur a déjà sollicité un certain nombre d’heures mensuelles d’information syndicale (sans débadgeage) auprès de différents interlocuteurs, dont les réponses divergent.

Certains en acceptent le principe pendant que le Secrétaire Général de la Préfecture de Seine – Maritime continue encore et toujours de refuser de nous les accorder “ (8). Piétinant ainsi le droit des agents à être informés par autre chose que les supports officiels de propagande de l’administration (Civique ou autres déclinaisons locales ou électroniques). Une attitude d’une grandeur démocratique qui mérite d’être saluée…

LE 29 MARS, TOUS DANS LA RUE
POUR DEFENDRE NOS RETRAITES

Le gouvernement a déjà prévu de rallonger rapidement la durée de cotisation à 41 ans en attendant 42 puis 45…Alors que l’âge moyen de départ à la retraite depuis le passage à 40 ans de cotisation en 1993 (pour le privé) et 2003 (pour le public), n’a pas pas changé puisque restant autour de 57,5 ans, ce nouvel allongement, avec les décotes qui vont avec pour les années manquantes, va entraîner de nouvelles substantielles diminutions des pensions versées aux futurs retraités.

Il s’agit, par ces mesures, de favoriser ensuite la généralisation des fonds de pension, dont bon nombre ont pourtant déjà fait faillite en Angleterre ou aux Etats-Unis. Confier l’avenir de nos retraites aux marchés financiers dont le fonctionnement, basé sur un capitalisme financier débridé, vient une nouvelle fois de démontrer son incurie, relève de l’irresponsabilité.

POUR EMPECHER SES NOUVEAUX RECULS
ET RECONQUERIR LES DROITS PERDUS,

MOBILISATION NATIONALE
LE SAMEDI 29 MARS 2008 DANS TOUTE LA FRANCE  (9)

LES PRINCIPALES REVENDICATIONS DE SUD INTERIEUR

  • un avancement garanti et linéaire pour tous impliquant par conséquent aussi bien le retrait du dispositif d’évaluation et son corollaire, le salaire « au mérite » dont l’autre nom est « tête du client  » ;
  • une rémunération digne de notre travail avec rattrapage immédiat des près de 7 % de pouvoir d’achat perdus depuis 2000  ;
  • une revalorisation substantielle des grilles indiciaires avec un SMIC à 1 500 nets  ;
  • l’intégration des primes dans le calcul de la retraite  ;
  • une véritable réduction du temps de travail avec création corrélative d’emplois statutaires correspondant avec titularisation des non – titulaires et précaires ; ce qui passe déjà par l’arrêt des suppressions de postes.

 
(1) La Gazette du 21 janvier 2008
(2) Cette possibilité existe déjà pour les contractuels mais de manière limitative et très encadrée
(3) Sur la chaîne Public Sénat le 19 mars 2008. Cité par une dépêche de l’agence Associated Press du même jour
(4)  www.latribune.fr du 19 mars 2008
(5) par arrêté du 29 janvier 2008 paru au JO le 2 février. Cité par Le Canard Enchaîné du 12 mars 2008 ; information parue dans Le Canard Enchaîné du 19 mars 2008
(7)  www.latribune.fr du 22 février 2008
(8) Le dernier refus datant du 11 mars 2008
(9) A l’appel national de la CGT, de la FSU et de l’Union syndicale Solidaires

Solidaires Unitaires Démocratiques Intérieur – Membre de Sud Collectivités Territoriales – Membre de l’Union Syndicale Solidaires – 80,82 rue de Montreuil 75011 PARIS