Le mercredi 28 janvier dernier, le ministre de l’Intérieur a dévoilé son plan de lutte contre le suicide dans la police. Si les mesures annoncées ne sont pas dénuées d’intérêt, elles démontrent une nouvelle fois que le ministère passe à côté du sujet principal : lutter contre les causes et non les conséquences.
Embauche de quelques psychologues et médecins de prévention, casiers individuels pour l’arme de service, fonctionnaires référents… ces mesures ont le mérite de créer de l’emploi et d’apporter une solution à court terme. Mais peuvent-elles réellement lutter profondément contre le mal-être policier ? Il ne faut pas oublier que le suicide n’est qu’une des facettes de ce mal-être : déprimes, dépressions, burn-out. Les risques professionnels ne se résument pas au suicide et de nombreux fonctionnaires souffrent dans leur cadre professionnel.
On aurait pu espérer une prise de conscience de l’administration qui souhaite réfléchir également à l’amélioration des conditions de travail mais là dessus, les propositions sont floues. On évoque une réflexion sur les cycles de travail. Pourquoi pas, mais cela reste léger, très léger même. D’ailleurs, on peut douter qu’elle aille dans le bon sens quand le ministre invite les chefs de service à « mieux gérer les tensions qui peuvent exister dans un service et générer un mal être chez les fonctionnaires ».
Une phrase banale au premier abord, mais difficile à encaisser quand on sait que nombre de chefs de service, de commissaires et d’officiers génèrent les dites tensions. Une manière de se voiler la face.
Le ministère reconnaît tout de même qu’il faut désormais travailler au choc que subissent les jeunes policiers entre leurs idéaux avant l’entrée en école de police et la réalité du terrain, générateur de tensions tant le décalage est important. Bien entendu, SUD INTERIEUR ne peut être que d’accord sur ce constat. Mais il est utile de rappeler que ce décalage est du en grande partie aux politiques sécuritaires des gouvernements successifs qui ont transformé (négativement) la police en profondeur et ont accru les tensions entre les policiers et le reste de la population. À cela s’ajoute le manque de moyens, la pression du résultat chiffré et le manque de soutien de la hiérarchie. Tout cela mine des générations de policiers pour qui – pour un nombre non négligeable du moins – leur métier est une vocation.
Démocratiser et humaniser la police
Comme nous le disions en novembre dernier sur le sujet (1), la lutte contre le suicide des policiers doit passer, pour réussir, par une démocratisation de l’institution et par la redéfinition des politiques de sécurité. Il faut humaniser l’institution policière, chose impossible si on persiste à enfermer les policiers dans des politiques sécuritaires et liberticides, à les opposer à une grande partie de la population et à leur demander des résultats statistiques dénués de sens et sans les moyens humains, financiers et matériels nécessaires à l’exécution de leurs missions (2).
Il est temps d’entamer de véritables réflexions autour du principe hiérarchique, de l’obligation de réserve, des abus de pouvoir dont sont victimes de trop nombreux policiers, y compris quand ils sont représentants syndicaux (3).
Le ministre a demandé que le slogan « Merci la police » résonne le plus possible. Ce n’est pas d’un merci dont ont besoin les policiers aujourd’hui. Ce sont des actes et des droits qu’ils attendent. C’est de pouvoir exercer leurs missions dans les meilleures conditions et que l’administration soit leur alliée. Ce n’est actuellement pas le cas.
SUD INTERIEUR :
DU FOND ET DE LA METHODE
ADHEREZ A SUD INTERIEUR
(1) Lire sur notre site : http://www.sudinterieur.fr/2014/11/11/suicide-dans-la-police-ca-continue/
(2) Des moyens qui doivent être renforcés tout particulièrement en matière de lutte contre les délinquances économique et environnementale, dont les principaux auteurs sont issues des classes dirigeantes
(3) SUD INTERIEUR connaît parfaitement ce sujet puisque plusieurs de ses représentants ont eu des problèmes avec l’institution en raison de leur appartenance syndicale, dont une, Véronique HURTADO a été révoquée (lire sur notre site : http://www.sudinterieur.fr/2014/10/17/revocation-de-notre-deleguee-syndicale-veronique-hurtado-le-ministre-doit-retirer-cette-sanction-illegitime/