Penser ?

Le mois dernier, en diffusant le tract « Penser Tarnac et la Récession qui vient », Sud Intérieur, rappelait à sa manière les fondements attendus d’un État de droit ainsi que le socle de constitutionnalité(1) supposé coiffer Marianne et lustrer l’hermine républicaine.

Cela ne nous étonne, ni ne nous chagrine beaucoup, mais, malheureusement, une persistante réverbération d’échos – que nous aimerions croire exagérés ou erronés ‐ nous fait depuis part de l’extrême voire excessive exaspération de l’Administration à propos de ce document. Ah bon ?

Pourtant, notre relation de l’Affaire de Tarnac se contentait, au travers d’un déroulé strictement factuel, de questionner, entre autres, les principes de « présomption d’innocence » et de « secret de l’instruction ». D’énoncer en filigrane qu’à l’instar des ordres Judiciaire, Exécutif et Législatif, le 4ème Pouvoir (la Presse) doit rester strictement séparé pour être pleinement indépendant.

Tout mélange des genres, toute mise en musique concertée, toute appétence incestueuse amènerait à desceller, à rabattre, progressivement, lascivement ou brutalement le levis si éraflable des Libertés Publiques.

Précisons que si, sous la « paterne férule » de la Magistrature, la Police et la Gendarmerie sont tenues d’enquêter à charge comme à décharge, le journaliste quant à lui ne saurait, dans sa propre fonction d’investigation, être bridé par des intérêts autres que ceux d’informer son lectorat ou, à sa libre appréciation, de révéler, d’interpeller ou de dénoncer. Tout abus attentatoire étant bien sûr, là aussi, sanctionnable.

« Cela est bel et bon ‐ nous direz‐vous ‐ mais, de votre Administration, prétendument si Colère, qu’auriez vous à nous apprendre ? ».

« D’abord – rétorquerons‐nous – nous préférons rester circonspects. Et puis, pareils aux courants marins, nous connaissons que les vents divaguent certes, en fonction de l’inclinaison du Globe, du magnétisme terrestre et des radiations de leur Soleil mais aussi par l’activité que journellement se construisent les Humains… ».

Classer !

Cependant une chose est acquise : le jeudi 14 mai, à 9h55, le répondeur de Sud Intérieur s’imprégnait d’un curieux message, disant en substance : « Euh, ici Mlle X, euh (ton stressé), ma hiérarchie me demande, euh (ton encore plus stressé), si vous pouvez nous faire parvenir par mail, tout de suite, un courriel nous certifiant que ni vos statuts ni la composition du conseil syndical n’ont changé depuis 2002 [date de création de Sud Intérieur  (2) ]. Merci, merci beaucoup, c’est vraiment nécessaire pour que nous puissions vous donner vos journées syndicales (3) (ton vraiment très très stressé) ».

Peu auparavant, la même personne nous apprenait que « Dans le cadre d’une remise en ordre du dossier de tous les syndicats (?!), on s’est aperçu que le vôtre n’était pas à jour (perdu pour partie ? oublié chez la ministre ?) chez nous [i.e la Direction de l’Administration de la Police Nationale, acronymée DAPN]. On n’a plus rien depuis 2002 (?!). C’est embêtant pour vos journées syndicales (?!). Mais on peut peut-être faire autrement ».

Outre que d’éventuelles défaillances administratives ne sauraient nous incomber, nous (syndicalistes, policiers, juristes, fonctionnaires du renseignement… ) demeurons sidérés par le candide, le drolatique inédit d’une telle scénarisation.

Quoi qu’il en soit, cet extraordinaire, cet extravagant document sonore est précieusement conservé par Sud Intérieur, l’Union syndicale Solidaires et leurs conseils.

A l’heure où le gouvernement met en avant la Rénovation du dialogue social, nous constatons que, tant pis, nous n’avons rien à attendre du présent cabinet.

Ce n’est pas grave. Il nous suffira d’être patients.

 
(1) Cf., notamment, le préambule de la Constitution de 1958 se reportant lui‐même à celui d’octobre 1946 : « Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tenté d’asservir et de dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. Il réaffirme solennellement les droits et libertés de l’homme et du citoyen consacrés par la Déclaration des droits de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ».
Ce préambule proclame, en outre, comme particulièrement nécessaires à notre temps, les principes politiques, économiques et sociaux ci-après (et sont listés les droits à l’emploi, à l’action syndicale, à la participation du travailleur, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises (…), à la grève, à la nationalisation dans l’intérêt de la collectivité dès qu’une entreprise acquiert les caractères d’un service public ou d’un monopole de fait, à la santé, au repos, aux loisirs, à la sécurité matérielle, à la culture, à des moyens convenables d’existence pour les diminués (âge, santé), à l’instruction (gratuite, laïque) à tous les degrés, à la formation professionnelle… )
(2) Lequel syndicat a pourtant, depuis, connu le bonheur de congrès et changements dans ses organismes dirigeants ; certains des fondateurs étant, par exemple, partis en retraite. Par ailleurs, nous croyons en la rotation des postes ainsi qu’au renouvellement des cadres…
(3) Lesquelles journées étaient demandées pour la fin mai. On l’aura donc vite compris : cela n’urgeait pas trop !

Sud Intérieur – Solidaires Unitaires Démocratiques Intérieur – Membre de Sud Collectivités Territoriales – Membre de l’Union Syndicale Solidaires – 80-82 rue de Montreuil (11ème) – mai 2009