Le RN, ennemi du Peuple, de l’État de Droit et des policiers

Les 30 juin et 7 juillet prochains, notre pays sera face à un choix : mettre l’extrême-droite au pouvoir, reconduire un pouvoir qui lui court après ou choisir une voie alternative, porteuse d’un désir de justice sociale, climatique et démocratique. Ce choix se présente à tous et toutes, y compris aux fonctionnaires de police et à l’ensemble des agents du ministère de l’Intérieur. Mais ce choix aura de lourdes conséquences sur l’institution policière et ses agents, qui pourraient être amenés à mettre en place une politique d’extrême-droite, une politique qui en séduit beaucoup mais qui se révélera aussi inefficace dans son objectif de sécurité que dangereuse pour nos libertés individuelles et collectives.

« Le laxisme doit laisser la place à la fermeté et ainsi donner tout son sens à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui fait du droit à la sûreté un droit naturel et imprescriptible. »

Cette phrase termine l’introduction du volet sécurité du programme établi par le Rassemblement National. Un exemple flagrant de comment l’extrême-droite tord la réalité, historique et juridique, au profit de son désir d’ordre autoritaire. En effet, le droit de la sûreté énoncé dans la DDHC de 1789 n’a rien à avoir avec un droit à la sécurité. Ce droit fut édicté pour prémunir les citoyens de l’arbitraire du pouvoir, en réaction aux fameuses lettres de cachet sous la monarchie absolue. Ce droit naturel imprescriptible est donc un appel à un État de Droit pour tout citoyen. Toute politique autoritaire et liberticide est une atteinte à ce droit.

Quand au laxisme supposé de la justice, la surpopulation carcérale comme l’augmentation du nombre de peines de prison prononcées et l’augmentation de la durée de ces peines démontrent le contraire. La justice punit plus durement qu’à l’époque du quinquennat Sarkozy et cette tendance débuta sous celui de Hollande et sa Garde des Sceaux Christiane Taubira, supposément laxiste1.

Une escroquerie sécuritaire au profit d’un projet liberticide

Le projet de l’extrême-droite, et du RN en particulier, en voulant transformer le pouvoir judiciaire en simple exécutant du pouvoir en place, via les peines planchers et la remise en cause de sa capacité à individualiser les peines d’une manière générale, est une attaque sur les principes fondamentaux d’une justice démocratique. Sans compter que la vision sécuritaire du RN est une véritable escroquerie, démentie et même démontée par les recherches en sciences sociales, l’Histoire ou encore les bilans menés sur certaines mesures déjà appliquées par le passé.

C’est le cas pour les peines planchers. Votées une première fois sous le mandat de Nicolas Sarkozy avec la loi du 10 août 2007, elles furent remises au placard en 2014 par la Garde des Sceaux Christiane Taubira. Des bilans avait été effectués sur l’efficacité de cette mesure. Or, ces bilans avaient montré que les peines planchers étaient globalement inefficaces à produire le résultat attendu, plus de sécurité. Au contraire, elles étaient néfastes, conduisant à une surpopulation carcérale et des sorties sèches favorisant la récidive au final2.

L’obsession du RN est l’ordre par la seule punition, convaincu, ou essayant de (se) convaincre que la sanction pure et dure amène la sécurité. Bien entendu, la recherche scientifique a surtout démontré le contraire. L’insécurité se combat avant tout par l’amélioration des conditions de vie. En améliorant la vie des gens, la violence et les autres formes d’atteinte aux personnes et aux biens reculent. C’est pourquoi la violence a, sur le temps long, reculé en France, à mesure que les conditions d’existence s’amélioraient. Et toute dégradation de ces conditions d’existence, localement ou nationalement, amène le retour de la violence. Car la mère de toutes les violences est la violence sociale et politique. Un État qui maltraite sa population génère une violence qui se retranscrit dans des comportements criminels ou délictueux.

C’est à travers la démocratie et les acquis sociaux que les nations ont pu s’apaiser et faire reculer la violence durablement. Toute atteinte à ces deux piliers conduit inexorablement à voir certains crimes et délits augmenter.

Briser le mythe d’une explosion de la violence

Néanmoins, il faut décrocher du mur ce portrait catastrophique d’une société projetée dans une explosion de violence que brossent le RN, l’ensemble de l’extrême-droite et de la droite, ainsi que nombre de médias concourant à cette course à la peur et à la haine de l’autre dans l’opinion publique.

Si certains chiffres sur la criminalité et la délinquance, édités par le ministère de l’Intérieur, sont en hausse, on sait qu’il faut pondérer leur interprétation. Par exemple, en ce qui concerne les violences, une partie de la hausse s’explique par la libération de la parole sur les violences sexuelles, conjugales et sexistes, grâce au travail des féministes et du mouvement MeToo, et dans l’amélioration qui en a suivi dans la prise en charge de cette parole, même si cette prise en charge reste encore largement perfectible.

Une autre manière d’évaluer le niveau d’insécurité mais aussi le sentiment d’insécurité, qui sont deux choses différentes, sont les enquêtes de victimation. Celles menées régulièrement au sein des collèges et lycées semblent indiquer une baisse des violences physiques et psychologiques au sein des établissements du secondaire. Certes, une petite hausse a eu lieu sur les incidents dits graves mais qui pourrait être due à une incitation plus pressante de signaler ces faits par les chefs d’établissement. Quoiqu’il en soit, malgré des faits divers qui ont pris une ampleur nationale et qui ont abondamment été commentés, dévoyés et instrumentalisés par le camp réactionnaire, rien n’indique une explosion de violence dans l’Éducation Nationale3.

Une autre enquête de victimation tend à démontrer cela, celle menée régulièrement en Île de France par l’Institut Paris Région. La dernière date de 2021 et montre un recul des atteintes aux personnes et aux biens alors que le sentiment d’insécurité est croissant4. On voit bien que le sentiment d’insécurité et l’insécurité réelle ne sont pas nécessairement corrélées. Et que, là encore, cette étude, en prise directe avec les habitant.e.s, démonte l’idée même d’une explosion de la violence, qui ne semble exister que sur les plateaux TV de Cnews et BFM TV.

Bien entendu, Sud Intérieur ne nie pas que la violence existe et qu’elle peut connaître une hausse dans certains domaines. C’est une évidence : des politiques publiques inégalitaires et une atteinte régulière aux libertés collectives et individuelles génèrent de la violence. Et plus les inégalités augmentent, plus la violence s’insinue dans la société, les règles communes de vivre-ensemble perdant petit à petit leur sens, les lois leur légitimité, remplacées par la concurrence féroce entre les individus. C’est tout le projet du système néo-libéral qui s’applique même, in fine, aux relations sociales de toute sorte.

Mais jouer à faire peur à la population en parlant d’explosion de la violence, en manipulant les chiffres et en mettant en avant 24h/24 des faits divers horribles, c’est une stratégie politique qui cherche à substituer la réalité pour une illusion de peur et de haine, propre à porter aux pouvoirs les pires idées5. Et à contrôler socialement par la crainte toute ou partie de la population.

Police et RN , liaisons dangereuses et illusion sécuritaire

Qu’en est-il de la police en elle-même ? Est-ce que les mesures proposées peuvent être mises en place ? Est-ce que cela sera efficace pour la sécurité de toutes et tous ? Est-ce que cela sera soutenable dans un modèle démocratique ?

La réponse est non. Non, le projet du RN n’est pas viable, tant dans l’objectif d’une police respectueuse de l’État de Droit et des citoyens que dans celui d’être efficace dans la lutte contre la sécurité. Nombre de fonctionnaires de police pourraient être séduits par un programme leurs donnant plus de moyens et les soutenant pleinement. Or, ceci n’est qu’apparence, qu’illusion.

En effet, la politique pénale du RN consiste à une extrême fermeté sur le plan judiciaire : peines planchers, exécution totale des peines de prison, fin des aménagements de peines, création de peines courtes de prison, doublement du nombre de magistrats et explosion du nombre de place en prison (85 000 en cinq ans dans son programme de 2022), expulsion des délinquants étrangers pour ne citer que ces mesures.

A cela, il faut ajouter le renforcement de la surveillance des frontières, la guerre à la drogue, au terrorisme, à l’islamisme, à l’immigration illégale, le renforcement du renseignement, tant sur le plan humain que technologique, des investissements dans les moyens matériels des forces de police et, bien entendu, le recrutement de milliers de policiers et gendarmes.

Or, tout cela coûte énormément d’argent. Comment le RN peut-il financer une politique sécuritaire de cette ampleur avec un logiciel économique libéral qui lui fait déjà renoncer à de nombreuses mesures sociales ? Alors que le RN recule sur ses propositions sociales et s’empêtre dans un programme économique mal fichu, où seuls les riches auront encore la grosse part du gâteau6, les promesses sécuritaires du RN ressemblent aux belles paroles d’un escroc. Et la police, déjà à bout de souffle, usée par des gouvernements successifs qui ont fait reposer sur ses épaules leurs politiques injustes et autoritaires, ne sera pas capable de répondre au dixième du programme du RN. Ce programme est tout simplement impossible à mettre en œuvre, en plus d’être dangereux pour la démocratie, les plus précaires et celles et ceux que l’extrême-droite désigne comme des ennemis (immigrés ou français d’origine étrangère, militants de gauche et écologistes, etc).

Résoudre des problématiques d’insécurité par le seul prisme policier et judiciaire n’a jamais été possible sauf dans le cadre de régimes totalitaires, où le respect du droit et de l’individu s’efface au profit de l’arbitraire et de la brutalité. Vu que le programme du RN fait de la sécurité sa priorité et que ce programme est inapplicable dans une société démocratique digne de ce nom7, on ne peut qu’en conclure qu’il cache un autre objectif, celui d’une société sous cloche, la cloche d’un régime fascisant. Une cloche que les gouvernements successifs depuis 20 ans ont patiemment aidé à construire, en particulier depuis la première élection d’Emmanuel Macron8.

Et les propos émanant du RN appelant à changer la Constitution si nécessaire pour faire passer des lois allant à l’encontre des valeurs défendues dans celle-ci, les valeurs de Liberté, d’Égalité et de Fraternité, est un signal d’alarme clair sur ses intentions en la matière.

De la libération des pires instincts policiers et de la mise en danger des agents

Cependant, même si le programme est illusoire et inapplicable, nul doute que le RN essaiera de faire passer un maximum de mesures mais aussi de changer la police, comme le fit Nicolas Sarkozy en son temps. Depuis ses fonctions de ministre de l’Intérieur puis en tant que Président de la République, l’ancien locataire de l’Élysée avait brutalement mis fin à la police de proximité et orienté la police vers une police d’intervention soumise à la politique du chiffre. Se faisant, il avait profondément changé l’ADN de la police, dans tous les secteurs, de la sécurité publique au judiciaire, en passant par le maintien de l’ordre ou le renseignement.

Aujourd’hui encore, l’institution comme les pratiques professionnelles des policiers sont le résultat de cette politique datant du début des années 2000. Et, à l’époque, nombre de policiers avaient sauté avec entrain dans cette police, se réjouissant de pouvoir intervenir comme des « cow-boys », notamment dans les quartiers populaires. Nous pouvons donc nous inquiéter de ce qui arrivera avec le RN au pouvoir quand on sait que les idées d’extrême-droite sont plus que présentes dans l’institution policière9 10.

On voit déjà, dans les mouvements de l’extrême-droite, des militants RN aux groupuscules néo-nazis, comment actes et paroles racistes et violentes se libèrent11. Comment imaginer que dans la police, où de nombreux policiers attendent qu’on leurs lâche la bride pour taper sur tout ce qu’ils considèrent comme des ennemis de la France, un tel phénomène ne puisse pas se produire ?

Et, comme dans un effet miroir, sous la gouvernance d’un parti d’extrême-droite réclamant l’impossible à la police tout en faisant tomber les digues de l’État de Droit, la pression va s’accroître sur les policiers et sur la population, exacerbant tant les violences entre la police et l’extérieur de l’institution qu’en son sein. Une véritable mise en danger des corps et des esprits au service d’un projet irréalisable pour la sécurité de tous mais profitable pour les intérêts de certains. Des intérêts qui n’engloberont pas les policiers, comme c’est déjà le cas avec tout gouvernement capitaliste, qui a besoin de la police tout en laissant les policiers au bord de la route avec le reste de la population.

L’escroquerie politique, intellectuelle, sociale et économique du RN est l’ennemie de toutes et tous, y compris des policiers et de l’ensemble des agents du ministère de l’Intérieur. Bien que l’extrême-droite s’érige en porte-voix des métiers de la sécurité, il propose finalement aux fonctionnaires de police et à l’ensemble de la population un projet mortifère pour la démocratie, et inefficace pour la sécurité de toutes et tous.

Le 30 juin et le 7 juillet,

Refusez que notre avenir commun soit condamné par la haine,

Dites non à l’extrême-droite !

Télécharger le Tract RN Police Sécurité Législatives 2024

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