Usage abusif et rémunération au rabais des volontaires Service Civique et CDD des préfectures et sous-préfectures : le 15 janvier, Sud Intérieur écrit au ministre pour que la loi soit respectée

Volontaires du service civiques et CDD des préfectures et
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Monsieur le ministre,

En ce début d’année 2021, SUD INTÉRIEUR a décidé de s’adresser à vous au sujet du détournement de l’usage abusif, depuis plusieurs années par les préfectures et les sous-préfectures, de volontaires du service civique et de contractuels à durée déterminée (CDD).

Ce constat, nous l’avons fait depuis longtemps. Mais, deux évènements précis venus corroborer sans discussion possible nos dires nous ont confortés dans l’idée que c’était le moment de se lancer.

I – le préfet Alain RÉGNIER pointe publiquement le détournement de l’usage abusif des volontaires du service civique

Il le fera dans l’émission « Cash investigation » diffusée le 10 décembre dernier sur France 2. Les termes qu’il emploiera dans ses réponses sont particulièrement édifiants comme le démontre le premier document que nous vous transmettons à l’appui les transcrivant (annexe 1).

Vous conviendrez avec nous qu’un haut fonctionnaire qui est aujourd’hui encore placé sous votre autorité comme délégué interministériel chargé de l’accueil et de l’intégration des réfugiés, le fasse avec autant de solennité démontre l’ampleur des dégâts.

II – la Cour des Comptes dénonce publiquement le détournement du recours abusif aux CDD

Quant à la juridiction financière de l’ordre administratif, elle n’est pas plus « tendre » concernant la même pratique dans son rapport annuel 2020 consacré à la mise en place du « Plan préfectures nouvelle génération » (PPNG).

Là encore, il vous suffira de prendre connaissance du second document que nous vous adressons pour vous rendre compte de la même ampleur des dégâts.

Ce détournement « industriel » (1), outre le fait – au mépris des lois qui encadrent leur usage – qu’il fait occuper des milliers de postes qui devraient l’être par des fonctionnaires titulaires, permet au ministère que vous dirigez aujourd’hui de faire de substantielles économies de rémunération.

Vous constaterez avec nous qu’il convient d’y remédier dans les meilleurs délais, tant il apparaît assez nettement que la loi n’a pas été respectée.

Assurément, le sort des personnes en service civique est la plus simple à régler puisque le recensement de tous les contrats depuis la mise en place du PPNG ne pose pas de difficulté particulière.

D’abord parce que chaque préfecture possède forcément un listing complet de chaque bénéficiaire qu’elle a engagé. Ensuite, parce l’agence du service civique (ASC) a dans ses archives la totalité des contrats d’engagement établis avec le ministère de l’intérieur.

Notre première revendication sera donc la suivante : requalification en CDD sur l’année 2021 – avec effet rétroactif pour ceux qui sont partis – de tous les contrats de service civique signés depuis la mise en place du PPNG.

La seconde, qui en est le corollaire : l’arrêt de ces recrutements en service civique sur des missions devant être obligatoirement effectués par des agents publics : titulaires ou contractuels dans les seuls cas limitativement prévus par la loi pour ces derniers.

Naturellement, cette requalification en CDD aura pour corollaire que leur niveau de rémunération soit substantiellement relevé, en faisant application :

– des dispositions voisines des articles 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifié portant droits et obligations des fonctionnaires (2) et I.3 du décret n°86-83 du 17 janvier 1986 modifié relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l’État pris pour l’application de l’article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État (3)

Dispositions dont nous savons qu’il n’est déjà pas rare qu’elles ne soient pas respectées, pratique que la jurisprudence sanctionne ;

– des conclusions de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) n°C-72/18 du 20 juin 2019 (4)

Cette dernière jurisprudence qui porte sur l’octroi d’un régime indemnitaire à un CDD qui lui avait été refusé au motif qu’il n’était pas fonctionnaire est d’une particulière importance puisqu’elle conclut justement que le statut de fonctionnaire ne compte pas au nombre des « raisons objectives » permettant l’octroi d’une prime aux seuls statutaires à l’exclusion des contractuels.

Elle va très clairement à l’encontre de celle du Conseil d’État qui estime, que compte tenu de leurs modalités de recrutement et leur durée, contractuels et fonctionnaires ne se trouvant pas dans la même situation juridique au regard du service public, cette distinction peut suffire à autoriser – sous certaines conditions – une différence de traitement, en particulier en matière de rémunération.

Si l’arrêt de la CJUE concerne l’attribution d’un régime indemnitaire, il ne fait guère de doute qu’il proscrit plus largement toute discrimination salariale fondée sur la seule différence de situation juridique.

Comme vous ne l’ignorez pas, l’arrêt susvisé s’imposant dans le droit national, vous devrez en tirer les conséquences en transmettant les instructions adaptées à tous les chefs de service habilités à recruter. Non seulement pour l’avenir, mais aussi rétroactivement pour tous les contrats (et avenants) entrés en vigueur dans la foulée de l’arrêt du 20 juin 2019.

Cette revalorisation consentie aux « services civiques » transformés en CDD trouvera évidemment également à s’appliquer aux CDD recrutés directement.

Étant donné l’enjeu, SUD INTÉRIEUR sollicite un rendez-vous pour échanger sur cette situation qui concerne des milliers d’agents.

Dans l’attente de ce rendez-vous, recevez, Monsieur le ministre, nos salutations syndicales.

SUD INTÉRIEUR

Télécharger le tract Service civique CDD courrier au ministre